Les soucis de Mario Draghi

Lorsque Mario Draghi déclare que l’euro est trop fort, et que s’il monte encore la BCE pourrait agir, il ne pense probablement pas aux exportateurs de la zone euro, et de ce point de vue Arnaud Montebourg, qui se réjouissait de ces propos, risque de déchanter.

Mario Draghi pensait plutôt au risque de déflation, car un euro fort fait baisser les prix intérieurs (par baisse des produits importés).

Les moyens d’action existent. Acheter de la dette publique comme la FED, pourquoi pas ? Mais outre que c’est contraire à la lettre des traités, quelle dette acheter ? Si elle achète de la dette allemande, les taux allemands déjà très faibles vont se rapprocher de zéro et réduire encore les revenus des épargnants allemands. Si elle achète de la dette grecque ou espagnole, les pays d’Europe du nord vont l’accuser de prendre des risques inconsidérés. Si elle se tourne vers les dettes des entreprises, le marché est trop petit.

Une fois les moyens déterminés et une baisse de l’euro obtenue, on risque des effets secondaires redoutables, car la montée de l’euro est portée non seulement par les excédent commerciaux, mais surtout par les flux de capitaux en provenance des pays émergents où les perspectives se sont assombries. Ce sont ces mouvements de capitaux qui permettent à la Grèce et à l’Espagne d’emprunter à des taux raisonnables.

Par conséquent, stopper ces entrées de capitaux par baisse vigoureuse de leur rémunération dans les pays centraux risque de faire remonter les taux des pays périphériques.

Source : Marie Charrel « Euro fort : le grand malentendu » Le Monde 20/21 Avril 2014

N.D.L.R. : Le vraie solution serait que la BCE puisse affirmer de manière crédible qu’elle achètera de la dette publique autant que nécessaire dans tous les pays, pour que les taux baissent partout. C’est parce que les « marchés » ne croient pas à juste titre à cette solutions qu’ils peuvent jouer sur les pays faibles. Une gestion centralisée de l’euro dans un ensemble décentralisé est en fait impossible. Et les exportateurs attendront encore longtemps une baisse de l’euro …